Les infirmières et les infirmiers peuvent être mis en cause dans différentes poursuites judiciaires. Cet InfoDROIT porte sur quatre procédures judiciaires : la discipline professionnelle, les poursuites au criminel, les griefs ou l’arbitrage, et les poursuites au civil. Lorsqu’une infirmière ou un infirmier est mis en cause dans une poursuite judiciaire, il ou elle devrait communiquer avec la Société de protection des infirmières et infirmiers du Canada (SPIIC) pour déterminer s’il est possible d’obtenir de l’assistance et pour discuter des prochaines étapes. Les infirmières et infirmiers devraient s’adresser à un avocat avant de discuter de la poursuite judiciaire avec qui que ce soit d’autre, avant de passer en revue tout dossier médical.
Discipline professionnelle
Les organismes de réglementation en soins infirmiers ont le mandat de protéger le public. Pour ce faire, ils veillent à ce que leurs membres inscrits (les infirmières et infirmiers) soient compétents et aptes à exercer la profession. Pour promouvoir la compétence, les organismes de réglementation établissent habituellement un ensemble minimal de normes de pratique à l’intention de leurs membres. Le non-respect de ces normes peut déclencher l’intervention de l’organisme de réglementation en soins infirmiers, ce qui peut donner lieu à des enquêtes et à des mesures disciplinaires. Les enquêtes peuvent porter sur tout aspect de la pratique et de l’intégrité professionnelle d’une infirmière ou d’un infirmier. Des exemples de faute professionnelle sont les erreurs dans l’administration de médicaments, une atteinte à la confidentialité, l’exercice de la profession infirmière sans permis, une communication inappropriée, un contenu inapproprié dans les médias sociaux, ou la maltraitance d’un patient.
Le processus disciplinaire est amorcé de l’une des deux façons suivantes : soit l’organisme de réglementation reçoit une plainte à propos d’un membre inscrit, soit l’organisme de réglementation décide de lancer une enquête à l’égard d’un membre inscrit sans avoir reçu de plainte officielle. Dans les deux cas, le membre inscrit sera informé qu’il est visé par une plainte ou une enquête, et on lui communiquera des renseignements sur le processus, y compris la question de savoir s’il doit répondre à la plainte ou à l’enquête, et le moment où cela doit être fait. Les plaintes peuvent émaner de l’employeur de l’infirmière ou de l’infirmier, d’un autre professionnel de la santé ou d’un membre du public. Habituellement, les plaintes donnent lieu à des enquêtes. Les organismes de réglementation peuvent entreprendre des enquêtes lorsque des renseignements portés à leur attention sont cause de préoccupations au sujet d’un membre inscrit. À titre d’exemple, les organismes de réglementation peuvent lancer des enquêtes après avoir vu des renseignements à propos de membres inscrits dans les médias sociaux ou aux nouvelles.
Lorsqu’un organisme de réglementation entreprend une enquête, il désignera un enquêteur chargé de l’affaire. L’enquêteur aura la tâche de réunir des renseignements pertinents, dont, notamment, l’examen des dossiers médicaux et des politiques applicables, et la réalisation d’entrevues.
L’enquêteur présentera ensuite son rapport au comité d’examen des plaintes, qui déterminera, le cas échéant, les mesures à prendre. La plupart des cas sont réglés à ce palier, avec ou sans médiation ou mode substitutif de résolution des différends. Si l’étape d’enquête ne permet pas de régler l’affaire, celle-ci est alors acheminée à un comité de discipline aux fins d’audience. Veuillez prendre note que ce processus peut varier selon le territoire de compétence dans lequel l’infirmière ou l’infirmier exerce sa pratique.
Le comité de discipline1 entend habituellement la preuve présentée par les témoins, par l’infirmière ou l’infirmier et parfois par des experts. Le comité rend ensuite une décision à savoir s’il y a lieu de prendre des mesures de discipline à l’endroit de l’infirmière ou de l’infirmier. Les décisions peuvent varier de l’absence de mesures de discipline à un avertissement verbal, un enseignement correctif, des conditions ou des limitations de pratique, ou même la suspension ou la révocation du permis. À cette étape, les infirmières et infirmiers peuvent même être assujettis à des sanctions pécuniaires.
En raison des répercussions éventuelles sur la pratique des infirmières et infirmiers, ils sont encouragés à se faire représenter par un avocat dès le début des plaintes ou des enquêtes. De nombreux employeurs n’assurent aucune représentation juridique relativement aux plaintes reçues par les organismes de réglementation ou aux enquêtes effectuées par ces derniers. L’assistance provient plus souvent d’un syndicat d’infirmières et infirmiers, ou du programme de Protection supplémentaire de la SPIIC, un service supplémentaire facultatif offert aux bénéficiaires de la SPIIC. Pour en savoir plus sur la Protection supplémentaire de la SPIIC, veuillez visiter la page : https://spiic.ca/services/protection-supplementaire-de-la-spiic/.
Poursuites au criminel
Une infirmière ou un infirmier qui est soupçonné d’avoir eu un comportement criminel peut être déclaré à la police. Initialement, la police peut recueillir des renseignements pour déterminer si les preuves sont suffisantes pour ouvrir une enquête. On pourrait demander à l’infirmière ou à l’infirmier de fournir des renseignements ou de formuler une déclaration. D’après ces renseignements, une enquête peut s’ensuivre et des chefs d’accusation pourraient éventuellement être portés en vertu des dispositions du Code criminel. Au nombre des accusations au criminel qui ont déjà été portées contre des infirmières ou des infirmiers, notons : vol de narcotiques, vol de biens appartenant à des patients ou à un établissement, négligence criminelle, infliction ou menace d’infliction des lésions corporelles, et agression sexuelle. Toute information fournie à la police peut être présentée en preuve contre l’infirmière ou l’infirmier lors d’un procès ultérieur. Par conséquent, avant de répondre à toute question ou de fournir une déclaration à la police, l’infirmière ou l’infirmier devrait consulter un avocat au criminel.
En raison de la complexité de ces procédures et des graves conséquences qu’entraîne une condamnation au criminel, il serait prudent de retenir les services d’un avocat en droit criminel dès que possible. Les employeurs n’assument habituellement pas les frais de défense contre une accusation au criminel, cependant le syndicat ou la SPIIC peuvent fournir une certaine protection.
L’infirmière ou l’infirmier devrait également déterminer si elle ou il est tenu de déclarer les accusations ou condamnations au criminel à son organisme de réglementation en soins infirmiers. Le cas échéant, l’infirmière ou l’infirmier devrait consulter un avocat en droit criminel ou la SPIIC relativement à la façon de présenter la déclaration. En règle générale, une auto-déclaration est requise, et ce, peu importe si les incidents donnant lieu aux accusations criminelles découlent de la pratique des soins infirmiers.
Grief et arbitrage
Un grief est défini habituellement par la violation des droits d’un employé dans le contexte de son emploi. La plupart des griefs portent sur des questions relatives à l’emploi, comme le harcèlement, la rémunération, une mise à pied et des problèmes de discipline. En règle générale, l’assistance relative aux griefs est prévue dans la convention collective de l’infirmière et de l’infirmier avec son employeur et, par conséquent, devrait être gérée par les syndicats et leurs représentants juridiques.
Le processus d’arbitrage est un renvoi à un tribunal indépendant qui entendra l’affaire. Cette audience est présidée par un arbitre. Les témoins des deux parties sont appelés à exposer leur version des faits et sont interrogés par les représentants du syndicat et de l’employeur (souvent des avocats). L’arbitre rend ensuite une décision définitive. Toutefois, il peut être possible d’interjeter appel à un tribunal judiciaire. L’assistance offerte par la SPIIC ne s’applique habituellement pas aux questions liées à l’emploi. Certaines infirmières et certains infirmiers peuvent bénéficier d’une assistance et d’une représentation juridiques par l’intermédiaire de leur syndicat d’infirmières et infirmiers.
Poursuite au civil (contentieux civil)
Une poursuite au civil s’entend d’une poursuite qui survient entre au moins deux parties lorsqu’il y a désaccord sur une question juridique, alors qu’une partie (le demandeur) demande à la cour de conclure à la responsabilité de l’autre partie (le défendeur) de lui imposer des dommages-intérêts (indemnisation). Dans le contexte d’une poursuite pour faute professionnelle dans le domaine de la santé, les demandeurs sont habituellement le patient et les membres de sa famille immédiate, comme un conjoint, des enfants à charge, des parents, ainsi que des frères et sœurs.
Une déclaration2 entame une poursuite au civil en décrivant les allégations formulées contre les défendeurs. Elle est déposée au tribunal et signifiée aux défendeurs. Les défendeurs sont ceux qui auraient porté préjudice au demandeur ou au patient. Les défendeurs peuvent être des personnes, par exemple des médecins et des infirmières et infirmiers, et des personnes morales, comme des hôpitaux et des autorités sanitaires régionales. Toute infirmière et tout infirmier nommé dans une poursuite devrait être représenté par un avocat.
Si le défendeur est une infirmière ou un infirmier employé qui est jugé négligent, le tribunal peut exiger que l’employeur paie les dommages-intérêts et les dépens. Cette décision est prise au cas par cas et fait intervenir plusieurs facteurs, dont la relation juridique entre l’infirmière employée ou l’infirmier employé et son employeur. Il convient toutefois de souligner que les employés restent responsables même lorsque leurs employeurs les assurent.
En outre, une infirmière ou un infirmier peut être mis en cause dans un recours collectif. Il s’agit d’une poursuite civile dans laquelle un groupe de personnes ayant été lésées de manière similaire est représenté collectivement par un membre de ce groupe (plutôt qu’une situation ou chaque personne intente sa propre poursuite civile). Si une infirmière ou un infirmier est tenu personnellement responsable, il ou elle sera donc responsable des dommages-intérêts accordés par le tribunal. La SPIIC pourrait être en mesure d’offrir de l’assistance juridique. Pour obtenir de plus amples renseignements sur la responsabilité civile, veuillez-vous reporter à notre InfoDROIT sur la Négligence. Si une infirmière ou un infirmier est désigné en tant que partie (défendeur ou défenderesse) dans un document juridique quelconque, il ou elle devrait être représenté par un avocat. Son employeur, son syndicat ou la SPIIC peut l’aider à obtenir une représentation juridique.
Il convient de souligner qu’une infirmière ou un infirmier pourrait être mis en cause simultanément dans une procédure de discipline professionnelle, une poursuite au criminel, une poursuite au civil, et une procédure de grief ou d’arbitrage. Les procédures simultanées peuvent avoir des répercussions sur la vie privée et professionnelle de l’infirmière ou de l’infirmier. Par exemple, si elle ou il est accusé d’un acte criminel, l’infirmière ou l’infirmier peut être signalé à son organisme de réglementation des soins infirmiers ou peut être tenu de s’autodéclarer. Conformément à ses obligations en tant qu’employée, la personne peut également être tenue de déclarer l’affaire à son employeur, ce qui peut déclencher une enquête de celui-ci. Un patient peut également décider d’intenter des poursuites contre l’infirmière ou l’infirmier pour les préjudices subis, le cas échéant.
Les autres procédures juridiques sont les enquêtes de coroner (enquête sur la cause du décès d’une personne), les enquêtes publiques, et les tribunaux des droits de la personne. L’infirmière ou l’infirmier pourrait bénéficier de l’assistance de la SPIIC.
Assurez-vous de communiquer tôt avec la SPIIC. En communiquant avec la SPIIC pour obtenir de l’assistance le plus tôt possible après avoir reçu un avis selon lequel vous pourriez être mis en cause dans une poursuite en justice (peu importe le type), cela nous permettra de respecter les échéanciers souvent serrés en ce qui concerne les réponses. Encore mieux, une consultation précoce dès qu’une question est soulevée pourrait permettre d’éviter que cela s’aggrave et devient une plainte ou une procédure juridique, ainsi que toutes les conséquences qui y sont associées. N’oubliez pas que la SPIIC est une ressource à laquelle vous avez accès dans le cadre de votre pratique quotidienne, et non pas uniquement lorsque vous êtes mis en cause dans une procédure juridique.
Les bénéficiaires de la SPIIC peuvent communiquer avec la SPIIC au 1-800-267-3390 pour parler avec un conseiller juridique de la SPIIC. Tous les appels sont confidentiels.
- Le comité de discipline porte un nom différent selon le territoire de compétence.
- Une déclaration peut être appelée différemment selon le territoire de compétence. Par exemple, elle peut être appelée « demande du demandeur » et une procédure peut être introduite au moyen d’un avis d’action ou d’un avis de demande.
Juin 2022
LA PRÉSENTE PUBLICATION SERT STRICTEMENT À DES FINS D’INFORMATION. RIEN DANS CETTE PUBLICATION NE DEVRAIT ÊTRE CONSIDÉRÉ COMME L’AVIS JURIDIQUE D’UN AVOCAT, D’UN COLLABORATEUR À LA RÉDACTION DU PRÉSENT BULLETIN OU DE LA SPIIC. LES LECTEURS DEVRAIENT CONSULTER UN CONSEILLER JURIDIQUE POUR OBTENIR DES CONSEILS SPÉCIFIQUES.